lundi 19 janvier 2009

Chroniques parisiennes


Métro, heure d’affluence

Tous ces heurts – leur influence

Ligne 9 : incident terrible : le gamin, en pleurs sur le quai.
Tombé par terre dans l’escalier. Sale écorchure.
Il fait froid ; les larmes de la chute et le premier sang coulé.

Ouverture des portes, on se presse.

S’abstraire alors. Tenter au moins. Toi aussi, tu peux le faire, deviens indifférent.
Tu n’es pas dans ce sanglot, non plus dans le regard vide de cette fille en manque qui te fait face. Tu ne vas pas tomber en désespoir devant la misère alentour.

Tu fermes les yeux et tu t’échappes. Tu es ailleurs, mais ça te revient :

Les haleines en partage, le contact, l’odeur forte et la moiteur

Tu reprends tes esprits alors. Métro Charonne, debout. Ta main entre toutes qui se tiennent à la barre humide. A ta gauche, le type venu de loin, inquiet – rivé à son portefeuille. Tout près à ta droite, cette femme qui s’est assise. Elle s’est assise et ça suffit pour qu’on la maudisse en silence, qu’on la voue tous aux gémonies de Paris.

République. Ca bouscule, la foule est dense, et tu marches sur des pieds. Pardon.

A cet instant, tu guettes. Tu attends. Le soulagement d’un regard complice, parce que ça arrive même ici. Le plus souvent, ça monte des poussettes. Et un sourire à ce moment-là, je t’assure, c’est une rencontre insensée.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

du vécu tout ça...
odeurs, angoisses, misère humaine, banale, quotidienne.

et t'arrives, tout de même, à faire de la poésie de ces scènes de vie...

comme disait l'autre, sortir des perles de la fange ? tranformer la boue en or ?
c'était comment déjà ?

alchimie...

rien à dire, sauf courage et continue.

Anonyme a dit…

Dans la foule

Les voilà qui se pressent comme courant vers leur mort
Collés les uns aux autres semblables à des chandelles
A la pointe brunie brûlée dans une chapelle.

Leur teint est blanc ou gris pollué par l'effort
D'une journée identique à celle de la veille
A l'usine à conduire, surveiller des machines
Au bureau, à l'écran, rigueur et discipline
Des gestes qu'ils répètent, certainement la routine,
Qu'il fasse chaud, qu'il pleuvine.

Qui porte comme un fardeau, sa sacoche sur l'épaule?
Qui pose sur sa tempe ses doigts comme une visière?
Epuisé mais heureux de rentrer, il est tard.

La foule ne parle plus, elle marche en silence
Les rames de métro sont bondées à outrance.
La voix seule des enfants brise par son innocence
L'indifférence des hommes aux heures d'affluence

S'introduire dans la foule et tenter l'impossible
Y reconnaître à son sourire un frère de coeur solitaire
Côte à côte s'en aller parler de choses et d'autres
Sans même se connaître, s'offrir un verre de bière
Ou même rentrer dans une église y semer une prière

Ils parleront chez eux selon toute vraisemblance
Heureux celui dont la compagne ne râle ni ne relance
Pour un siphon bouché, un robinet qui fuit.

La foule est monotone, à la ville à la guerre
Elle se veut légère, rassurante pour qui erre
Mais ne fait ni ne considère
Les êtres comme des frères.

La foule c'est soi vu d'une oeillère.
Une poudrière?
Une chimère?
Qu'est-ce que tu préfères?

Jean-Baptiste a dit…

@Leïla:

La foule c'est soi vu d'une oeillère. Assez génial, ça. De là, je préfère poudrière...

"Sans même se connaître, s'offrir un verre de bière": je veux connaître ta ligne de métro!

Anonyme a dit…

Rêvons un peu ! Journée Balnéaire.
Le Bosphore à la contre escarpe… Humboldt en courant à Laumière
Au comptoir des Deux Savoie, à coudées franches, les marins d’Amsterdam
Leurs dernières gouttes de bières en crachin matinal.
Et les filles de chaque port, en dérive depuis la Reeperbahn
Une sacré vermine ouais – Allez ! Toutes aux Halles !

Le fleuve océan sous le pont Mirabeau, la plage sur les pavés,
Et puis la défense - la grande île- pour ultime paysage.
Paris s’est gonflée d’un sang bleu comme la Seine… salé
Comme Carthage en son temps, prête à tous les ravages.

Je rate pas un paquebot en partance, aux Grands Augustins.
Je vais aux Célestins, à Orsay… parfois je vais ailleurs,
Je vois les colis de la CFAO, je vois les coolies en sueurs.
J’ai vu Blaise débarquer un cercueil à la main.
Toujours vivant, lui, avec une santé d’enfer
Rions un peu ! Paris Port-de-Mer.


Primo

Jean-Baptiste a dit…

@Primo

Waw waw waw
ça, c'est ce qu'on appelle des rimes riches. Riches d'images fortes et de références qui ne le sont pas moins. Paris est beau vu de Lima.
J'aime bien le "Humboldt en courant à Laumière" à Carthage en son temps, prête à tous les ravages. Et que dire des colis de la CFAO. On a grandi dedans. Les coolies d'une mémoire familiale. En sueur parfois..

Ma photo
Paris, France
"Kunst ist schön, macht aber viel Arbeit", comme disait l'autre.

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